La route était longue, tellement longue que je n‘avais même plus la force de m‘en lasser, la bouteille d’eau généreusement offerte par le foyer s’était transformer en un accordéon de plastique, servant à faire assez de bruit, assez pour être désagréable pour l’assistante social qui conduisait le véhicule, un jouet de choix. Son visage affichait clairement un grand agacement qui s’amplifiait au fur et à mesure, elle détournait à chaque fois sa propre attention pour ne pas déborder, parlant sur un ton crispé qui dévoilait sa rage intérieur, elle essayait de nous rassurer, de nous encourager, mais on avait entendu la même rengaine des dizaines de fois et je n’y prêtais plus aucune attention, elle était simplement comme tout ces hypocrites, si elles ne s’occupait pas de nous avec acharnement, je l’aurais certainement assommée, attachée et laissée sur le bord de la route comme une chienne. Un programme bien ambitieux malgré ma dizaine d’années, mon passe temps avait également le don d’empêcher ma sœur de dormir, j’étais en train de battre mon record, un petit jeu qui consiste à la maintenir éveillé le plus longtemps possible, dans ces circonstances, elle était d’autant plus malléable.
Après ces six interminables heures de voyage, à peine avais-je ouvert la porte et posé le pied à terre que je n’eux qu’une seule envie, me dégourdir, une petite fugue, histoire de mettre nos nouveaux « parents » dans le bain? Seulement je ne laisserais pas Chizu seule avec ces inconnus, et vu son manque de sommeil…j’étais pris dans ma propre connerie, coincé là, obligé de supporter une nouvelle bande de baltringue qui se croient assez bien pour nous. Horreur suprême…un jardin japonais avec un petit étang, une petite maison traditionnel, un petit chemin de gravier, des décoration florale, un cabanon tous blanc, trop, tous ça c’étais trop. La porte s’entrouvrait, quel tête de niais pouvait bien vivre dans un endroit aussi cucul, le drame survînt, ils passèrent la porte, des visages radieux, souriant et une sombre envie de gerber. Il la tenait par la taille, elle croisait les bras sur sa poitrine, ils essayait de nous montrer un couple uni et responsable, ils voulaient nous prouvés qu’ils avaient une vie stable à nous offrir, ça ne durerais pas, je découvrirais les cadavres de leur passé et les déterreraient pour m’en servir contre eux. Je pris la main de ma sœur, lui fît un signe de la tête pour la rassurer et me tourna vers notre futur ex-famille en prenant mon air et ma démarche les plus hostiles pour avancer lentement vers le portique.
Je ne me lassais jamais de ce rôle de mauvais garçon, c’étais jouissif de réduire à néant les espoirs que l’on fonde en vous, brisé la naïveté et la niaiserie, les faire sortir de leur monde enchanté ressemblant aux comptes de fées américains. Alors que je me trouvais devant lui, ce grand type, il devait se trouver supérieur, car il décida spontanément de se mettre à genou pour être à ma hauteur, j’avais juste envie de lui en collé une en travers de la tronche, il me prend pour un quelque de si faible? Il tendit sa main au dessus de ma tête, que comptait-il faire? Je ne suis pas un vulgaire animale de compagnie!
- « Bonjour Bonhomme, com.. »
- « Ne me touchez pas! »
Ma main repoussa la sienne, il n’était pas très musclé, mes os avaient percuté les siens et ça me faisait mal, mais je n’affichais rien, derrière moi j’entendis l’assistante social se presser du haut de ces talons aiguilles. Elle avait un air paniquer, normal, elle avait fini par comprendre mon cas et elle savait parfaitement qu’elle avait des raisons de s’affoler.
- « Du calme Kira, cet homme essayait juste d’être gentil. Monsieur, excusez-le, il est très timide et a du mal à s’adapter. »
Elle se pencha ensuite vers moi pour me chuchoter à l’oreille les mêmes consignes que d’habitude. Je perdais mon regard dans le vide pendant qu’elle s’évertuais à vouloir faire de moi un petit mioche modèle.
- « Ne soit pas si dure, ils ont une bonne situation et ils sont au courant pour…ton…problème, malgré ça ils ont acceptés de vous prendre en charge, tu devrais être reconnaissant. Montre leur ton si beau sourire et excuse-toi.»
Et puis quoi encore? Être reconnaissant, passe encore, mais je ne serais pas amicale avec cette sous-merde, il ne le mérite pas. Il n’arrive même pas à m’imposer son autorité, un homme qui se fait maitriser par un mioche de dix ans n’est pas capable d’en élever un. Après avoir laissé s’échapper un long soupire, je le regardais dans les yeux, on y lisait de la crainte et de l’incompréhension, il fuyait mon regard comme la peste, déviant le sien vers sa femme, lui adressant des petites tapes dans le dos pour qu’elle réagisse et le sorte de ce pétrin, il était perdu. En parlant de mes crises, ça allait faire bientôt plus de vingt quatre heures, un record vu la fréquence de leurs apparitions ces derniers temps, ils allaient probablement y avoir droit, raison de plus pour que j’évite tous contact physique.
- « Je vous propose de les mener à leur chambre si vous voulez bien, je dois vous parler des dernières formalités. »
La voilà sa porte de sortie à ce trouillard, il allait s’empresser de sauté dessus. Mais au moins on aurait le temps de discuter entre jumeaux.
- « B…Bien sûr…entrez donc…venez les enfants, la chambre est par là. »
Passer la porte d’entrée, un long couloir partant en bifurcation à droite et à gauche, ça paraissait beaucoup plus grand que de l’extérieur. Alors qu’ils s’engouffraient dans le dédale, nous les suivions, à distance de sécurité avec l’assistante sur les talons, je laissais mon regard s’échapper dans tous les sens afin de déceler une quelconque information, dont je ne connaissais pas moi-même la nature. Et mise à part des tableaux, il n’y avait pas grand-chose avec un réel intérêt. Pendant que j’étais distrait par ma recherche, ils s’étaient arrêtés, je le remarqua assez tôt pour ne pas leur rentrer dedans. Un rapide coup d’œil me permit de voir qu’il avait ouvert une porte et nous invitait de la main à rentrer à l’intérieur. Une simple porte coulissante faite de papier séparait les chambres, une vraie maison japonaise, il ne manquait plus que des futons et les ingrédients seraient tous réunis. Malheureusement, ils cassèrent tous le charme avec un simple lit superposer, même pas de télé, une bibliothèque remplie de livres qui, vu les couvertures, étaient plein de couleurs et d’images, deux bureau accompagné de la lampe, le typique poste optimisé pour les étudiants modèles. Dans un réflexe fraternelle, je pris possession de la couchette supérieur en y jetant ma veste, ma moitié n’aimait pas les endroits en hauteur, je pouvais bien lui laisser ce privilège. Je saisi la première chaise en bois qui trainait pour y laisser s’affaler mon corps, dans une position d‘assise à l'envers, je posais mon menton sur le dossier et Adressa un regard dédaigneux aux adultes qui étaient toujours à la porte.
- « Vous n'deviez pas discutez? »
Le ton sarcastique et odieux avait fait son œuvre, ils tournèrent les talons. En fermant la porte. Je me tordis la nuque pour voir Chizu.
- « N’espère pas t’endormir, il faut qu’on parle. »